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le ravissement

le ravissement

le ravissement

État mystique, supérieur à l’extase, dans lequel l’âme, soustraite à l’influence des sens et du monde extérieur, se trouve transportée dans un monde surnaturel, amenée vers Dieu. Dans la nuit, Vintras eut un ravissement. Il fut enlevé par la lumière divine au delà de nos horizons et hors des limites de nos sens (Barrès, Colline insp., 1913, p. 194):1. … ses yeux qui ne voyaient déjà plus, emplis de l’éblouissement de la mort, semblaient apercevoir l’infinie perfection, au delà de la vie, dans un ravissement d’extase dont toute sa face s’éclairait. Zola, Argent, 1891, p. 423.C. −P. anal.1.Rare. [Avec compl. prép. indiquant ce qui provoque cet état] Perte de conscience partielle ou totale du monde extérieur. [Nos jourssont encore pareils aux doigts de ton amie, dont les caresses, dis-tu, surpassent le ravissement de l’opium (Toulet, Comme une fantaisie, 1918, p. 50).2. État de bonheur, de plaisir extrême qui fait oublier tout ce qui ne suscite pas ce plaisir. Être, tomber dans le ravissement; être pris de ravissementJe pensais (…) en entendant ce chef-d’œuvre [Tancredi de Rossini] du Guide de la musique, que le degré de ravissement où notre âme est portée fait le thermomètre du beau musical (Stendhal, Hist. peint. Ital., t. 2, 1817, p. 144): source : cnrtl.fr

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un jour j’avais décidé de prendre un peu de hauteur

un jour j'avais décidé de prendre un peu de hauteur
un jour j’avais décidé de prendre un peu de hauteur

un jour j’avais décidé de prendre un peu de hauteur – Mathieu Bernard-Reymond : Le Voyage à Nantes

« Toute âme qui s’élève, élève le monde. »

Gandhi

(Figuré) Observer sous un autre point de vue ; voir sous un autre angle. (Wiktionnaire)

Mathieu Bernard-Reymond, photographe français, né à Gap en 1976

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rester debout

rester debout
rester debout

rester debout

Le sens, comme l’a montré la philosophie grecque, est donc ce qui me fait « vivre » ou « survivre » comme être humain « existant », mais qui peut aussi me faire « mourir », car il est ce « au nom de quoi » je m’engage, parfois jusqu’à prendre le risque de la mort…

Un détour par l’étymologie nous permettra de développer les champs sémantiques de ce terme et de montrer son immense richesse. Ainsi la racine indo-européenne sta, « se tenir debout », définit quatre champs :

1. L’idée de se tenir debout ; le grec stasis, a le sens de « se lever » mais aussi de « se soulever contre » ; stauros désigne un pieu et histos un mât, il indique « la stabilité », la force de la « fixité » de ce qui s’établit. Le latin reprend cette racine dans le mot statuere, qui se décline dans stabulum, « l’étable », superstare, « se tenir au-dessus », constare, « être ferme », « constant », ou encore dans prostituere, « exposer ». « Substance » en philosophie est ce qui se tient sous, supportant le sujet ou son essence, et qui peut demeurer caché. Ainsi, la résistance est ce qui me ferait tenir debout comme existant, comme un mât dressé ou comme un pieu.

Dresser, c’est aussi « se placer devant », « arrêter », « faire obstacle » (ce qui se tient debout pour faire barrage). L’obstétrique est l’art de la sage-femme qui se tient debout devant l’accouchée pour l’accueil du bébé. Justitia, la justice, ce qui tient par le droit, a fonction de se dresser parfois, de faire obstacle au pulsionnel qui habite chaque être humain.

« Se tenir debout », c’est aussi ne pas tomber sous les charmes de la séduction, résister aux avances de prétendants…

2. L’idée d’une « chaîne qui tient ensemble », stemon en grec, est la chaîne du tisserand ; fils de chaîne verticaux des tapisseries de haute lice ou horizontaux des tapisseries de basse lice, ils tiennent tout le tissu. Circumstantia est un assemblage de situations et d’éléments entre lesquels on peut établir du lien et des corrélations ; le contraire est la distantia, c’est-à-dire la distance, la séparation, ce qui ne tient pas.

3. L’idée de ce qui ne se détruit pas ; le fil de résistance électrique, non seulement ne se détruit pas, mais il produit de la chaleur ou de la lumière. La « résilience », en physique, caractérise la « résistance » des matériaux au choc ; en psychologie, elle est le ressort moral qui permet de rebondir dans les situations difficiles. Boris Cyrulnik en fait la capacité des humains, et des enfants en particulier, à surmonter des traumatismes graves. La « résistance » est donc la force que l’on oppose à des forces de destruction (cf. Bichat, La définition de la vie), la « résistance » fait tenir le coup, supporter la souffrance. Elle est d’ailleurs parfois confrontée au temps : autant que la violence d’un choc, la durée est redoutable ; l’amour par exemple peut-il « résister » au quotidien et aux habitudes de la vie ?

4. L’idée de « restaurer », de « se restaurer », de retrouver quelque chose qui a été perdu ou oublié, déformé. Le « restaurant » est l’endroit où l’on reprend des forces perdues dans le travail ou dans la vie. Restaurer, c’est rétablir la vigueur, la santé, par les aliments ou les remèdes appropriés, et « instaurer » a un sens assez proche puisqu’il s’agit de l’idée de « s’appuyer sur », « d’établir » ou encore de fonder.

Les champs de la « résistance » sont donc nombreux. source : Exister et résister, Jean-Bernard Paturet Dans Empan 2005/1 (no57), pages 12 à 15 cairn.info

tags : phoque, piscine, philosophie, politique

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liberté je crie ton nom

liberté je crie ton nom

liberté je crie ton nom

Quelles sont les 5 libertés fondamentales ?

On peut notamment mentionner la liberté d’entreprendre ; le droit au respect de la vie privée et familiale ; la liberté d’association et de réunion ; la liberté de manifestation ; la liberté de circulation… Ce qu’il est important de comprendre c’est que les libertés fondamentales ne sont pas des libertés « absolues » source : initiadroit.com

tags : bambi, faon prisonnier d’un grillage, libération

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avec l'Otan, va, tout s'en va

Nietzsche : Dieu est mort

Nietzsche : Dieu est mort

Nietzsche : Dieu est mort (1882)

Dieu est une image… Nietzsche s’exprime presque toujours de façon imaginée, il en joue avec brio, « Dieu » veut dire quelque chose qui possède une épaisseur philosophique. Pourquoi choisir ce mot ? Dieu représente le sacré, ce qu’on vénère, ce qu’on a plus de précieux quand on est croyant, ce qui constitue la norme indiscutable, objective, de l’existence, et c’est précisément cela que Nietzsche emprunte à la notion de Dieu pour le transporter à l’ensemble de la vie humaine… Par Dieu, il va désigner ces choses qui sont le sacré, les croyances fondamentales, capitales, réglant la vie humaine telle qu’elle est organisée en Occident. Nietzsche nous dit que ce qu’il y a de sacré, d’intouchable (ce qu’il va appeler techniquement des « valeurs » quand il s’adressera aux philosophes), ces valeurs sont en crise, et même, en train de perdre leur statut de valeurs, de normes, de références… source : France Culture

tags : Jésus, la chute des idoles

Andre Baraglioli : Il va moins bien marcher, maintenant…

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il faut vivre pour manger the truth (de toilette)

l’homme est bon

l'homme est bon - Sofie Vangor
l’homme est bon – Sofie Vangor

l’homme est bon – Sofie Vangor

Jean-Jacques Rousseau : « L’homme est naturellement bon et c’est la société qui le corrompt »

Dans le Discours sur l’origine des inégalités parmi les hommesRousseau développe une longue métaphore sur l’état de nature, l’état pré-civilisationnel. Il décrit cette période de l’humanité comme étant la plus heureuse. Dans l’état de nature selon Rousseau, l’homme est autosuffisant et cultive son bout de terre librement. Etre stupide, robuste et candide, l’homme naturel vit aussi dans un état pré-moral, ne connaît ni le bien ni le mal et vit au présent, sans soucis des lendemains. Contre Hobbes, qui décrit l’état de nature comme un état de guerre, Rousseau fait de l’état pré-civilisationnel une époque de paix et défend le mythe du bon sauvage, être pur face à l’homme civilisé perverti. source : la-philosophie.com

L’art de paraître met en évidence deux séries d’œuvres de Sofie Vangor et Emilio Lopez-Menchero, respectivement intitulées « Je veux et j’exige » et « Trying to be… ». Jouant avec la figure humaine et détournant l’art du portrait, les créations des deux artistes se rejoignent notamment dans le mot « paraître » et ses significations. Entre l’avoir l’air et l’apparition, ce mot oscille d’une définition à l’autre selon les œuvres… source : Sofie Vangor

autres publications bretzel liquide taguées Sofie Vangor

tag : veau

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comprendre les expressions françaises exercice illégal de la profession de jardinier

cultive ton jardin

cultive ton jardin - Ana Mendieta, untitled, grass on woman, 1972
cultive ton jardin – Ana Mendieta, untitled, grass on woman, 1972

cultive ton jardin

dit Candide à Pangloss à la fin du célèbre conte philosophique Candide ou l’Optimiste ; Voltaire précise que le jardin d’Eden n’a pas été créé pour que l’homme trouve le repos mais pour qu’il y travaille, qu’il exerce son talent. source : vivelaculture

Ana Mendieta, untitled, grass on woman, 1972

« Ana Mendieta, (La Havane, 1948-New York, 1985), artiste cubano-américaine reconnue internationalement, est considérée comme l’une des artistes les plus prolifiques et novatrices de la période de l’après-guerre. Les expositions qui lui ont été récemment consacrées en Europe (Berlin, Londres, Prague, Salzbourg, Turin et Umeå) ont mis en lumière la puissance de sa vision artistique tout autant que l’influence qu’elle a exercée sur les générations d’artistes lui ayant succédé, une œuvre dont le retentissement sur le public de tous âges et de toutes origines ne se dément pas.

Au cours de sa brève carrière, de 1971 à 1985, Ana Mendieta produit un ensemble remarquable d’œuvres : dessins, installations, performances, photographies et sculptures, mais aussi films. Son travail filmique, moins connu, n’en constitue pas moins un corpus d’œuvres particulièrement impressionnant et prolifique : les 104 films qu’elle a réalisés de 1971 à 1981 lui ont conféré le statut de figure incontournable dans le domaine des arts visuels pluridisciplinaires qui a émergé au cours des années 1970 et 1980.

S’appuyant sur des travaux de recherche inédits, l’exposition du Jeu de Paume replace les films de l’artiste de la périphérie au centre de son travail. Elle s’articule autour des thèmes récurrents qu’ils explorent – la mémoire, l’histoire, la culture, le rituel et le passage du temps –, souvent évoqués au travers de la relation du corps et de la terre. Majoritairement tournés dans un environnement naturel, ils font la part belle à son intérêt pour les quatre éléments, la terre, l’eau, l’air et le feu. » source : Jeu de Paume

tags : philosophie, culturisme, origine du monde

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le moment zen du soir

le moment zen du soir : le colibri et le léopard
le moment zen du soir : le colibri et le léopard

le moment zen du soir : le colibri et le léopard

« Relaxer son corps, apaiser son esprit pour être zen, passent aussi par la présence d’éléments zen dans son environnement. On agrémentera les pièces de la maison d’éléments invitant à l’harmonie et la spiritualité comme une fontaine d’intérieur ou des plantes vertes, on utilisera du linge de lit en matière naturelle comme le chanvre, on diffusera des huiles essentielles et on évitera la présence de fauves sauvages et sanguinaires.

La relaxation n’est pas une simple détente, elle exerce ses bienfaits sur tout le corps : elle permet de relâcher les tensions musculaires, de se rééquilibrer, d’être zen, d’améliorer sa circulation sanguine, de prendre du recul et d’agir avec des idées claires et non sous le coup de l’émotion, d’avoir des relations plus harmonieuses avec son entourage… » source : couleur-chanvre.com

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la terre mère

la terre mère, Eva Milkonskaya
la terre mère, Eva Milkonskaya

la terre mère

Eva Milkonskaya 

est une photographe conceptuelle de Kazan, en Russie. diplômé en psychologie. Ses portraits d’art sont à la fois beaux et mystérieux. Ils vous tiennent en haleine avec leur beauté légèrement dérangeante et unique. Dans ses clichés, le corps humain est le protagoniste. Dépouillé de tout clinquant, il devient un sujet sérieux et authentique, une divinité contemporaine. Ces corps semblent spontanément fusionnés avec la nature qui les entoure, même si glaciale et hostile. Imagenation

« La Terre est la mère universelle.

 Eschyle glorifie la Terre qui« enfante tous les êtres, les nourrit, puis en reçoit à nouveau le germe fécond » (Choéphores, 127-128). Une conception analogue survivait encore au XIXe siècle parmi certaines tribus primitives. Un prophète de la tribu nord-américaine Umatilla refusait de travailler la terre : « C’est un péché, disait-il, de blesser ou de couper, de déchirer ou de griffer notre mère commune, par des travaux agricoles. » Et il ajoutait : « Vous me demandez de labourer le sol ? Irai-je prendre un couteau pour le plonger dans le sein de ma mère ? Mais alors, lorsque je serai mort, elle ne me reprendra plus dans son sein. Vous me demandez de bêcher et d’enlever des pierres ? Irai-je mutiler ses chairs afin d’arriver à ses os ? Mais alors je ne pourrai plus entrer dans son corps pour naître de nouveau. Vous me demandez de couper l’herbe et le foin et de le vendre et de m’enrichir comme les Blancs ? Mais comment oserais-je couper la chevelure de ma mère ? »

L’hymne homérique dédié à Gaia (Terre) exalte « la Terre, mère universelle aux solides assises, aïeule vénérable qui nourrit tout ce qui existe […]. C’est à toi qu’il appartient de donner la vie aux mortels, comme de la leur reprendre […]. » C’est la raison pour laquelle la grande déesse, la Terre-Mère, est considérée non seulement comme la source de la vie et de la fertilité, mais aussi comme la maîtresse du destin et la déesse de la mort. Dans l’Inde, Durgā-Kālī est à la fois créatrice et destructrice, principe de la vie et de la mort.

En Mésopotamie, Ishtar est la déesse de l’amour par excellence, mais aussi la déesse de la guerre. On l’appelle « Dame de l’amour », « Reine du plaisir », mais aussi « la Vaillante », « la Dame des batailles ».

Parmi les noms de grandes déesses, les plus connus sont Ardvî et Anâhita en Iran, Ishtar à Babylone, ‘Atar’ate en Syrie, Astarté en Phénicie, Tanit à Carthage, Déméter et Aphrodite en Grèce, Cybèle en Asie Mineure. Toutes ces déesses présentent une structure analogue. Elles expriment la sacralité de la vie et le mystère de la fertilité, mais aussi le caprice et la cruauté. D’un côté, elles prodiguent la vie, la force et la fécondité ; à l’opposé, elles apportent la guerre ou les épidémies. Presque toutes sont des déesses de la vie, de la fertilité et de la mort tout ensemble. En un certain sens, on peut déchiffrer dans leur personnalité la valorisation religieuse de la vie cosmique, avec tous ses mystères et toutes ses contradictions ». source Universalis.fr

La création de la vie à partir d’argile 

est un thème récurrent du créationnisme apparaissant au sein de la mythologie, la littérature et de certaines théories modernes. Wikipedia

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retapeur de cervelle et machine à décerveler

Le retapeur de cervelles (Émile Cohl, 1910) vs La machine à décerveler (Alfred Jarry, Ubu Roi, 1896)
Le retapeur de cervelles (Émile Cohl, 1910) vs La machine à décerveler (Alfred Jarry, Ubu Roi, 1896)

retapeur de cervelles (Émile Cohl, 1910) et machine à décerveler (Alfred Jarry, Ubu Roi, 1896)

Emile Cohl : le retapeur de cervelle

Gaumont :

Émile Cohl collabore avec la société Gaumont de mai 1908 à septembre 1910. Il est d’abord recruté pour écrire des scénarios, puis rapidement, deux mois après, il est chargé de mettre en scène et ce en raison des multiples talents évoqués précédemment. Il sait écrire puisqu’il est l’auteur de plusieurs vaudevilles, il a, grâce à ses illustrations, une expérience certaine de la composition en images et n’ignore pas les subtilités de la direction d’acteur puisqu’il a lui-même joué la comédie. Les scénarios ne lui étaient rétribués qu’une vingtaine de francs, alors que la rémunération des films est en moyenne de 150 francs. Trois années de production presque équivalente : 20 films en 1908, 32 en 1909 et 29 en 1910, où il affirme des qualités qui lui permettront de subsister au sein d’une corporation labile. En 1908, il réalise autant de films de fiction, comiques et drames, que de féeries ou de films à trucs, et s’essaye juste au dessin animé. En 1909, sa production est majoritairement composée de films à trucs, tandis qu’en 1910, les dessins animés dominent. Le rythme est dans l’ensemble soutenu, inventant et réalisant un nouveau sujet par mois lorsqu’il s’agit de comédie ou de film à trucs, il peut par contre, passer près de deux mois sur les dessins. D’après le témoignage d’Étienne Arnaud, suite à la présentation parisienne de la Maison hantée, Émile Cohl se verra confier le soin de développer, pour la société Gaumont, le procédé du trucage image par image. L’affirmation est confirmée par la filmographie puisque parmi les films conservés plusieurs titres reposent exclusivement sur ce procédé, qui consiste à filmer photogramme par photogramme l’avancée progressive d’un objet, afin qu’une fois projeté à la vitesse de 16 images par seconde (aujourd’hui 24 images), l’objet paraisse se déplacer seul. Dans les Chaussures matrimoniales (1909) par exemple, les souliers de monsieur et de madame en anticipant sur la rencontre à venir aident à la formation du couple. Le Champion du jeu à la mode (1910) montre un homme parvenant à assembler les pièces d’un puzzle par la seule force de l’esprit. Tandis que dans le Mobilier fidèle (1910), les meubles saisis reviennent d’eux-mêmes à leur ancien propriétaire. Alors qu’il réalise ces films, Émile Cohl pense à adapter le principe au dessin. Marcel Lapierre, dans un article documenté (6 Marcel Lapierre, les Cent Visages du cinéma, Paris, Grasset, 1948, p. 65.), le souligne :

Tandis qu’il travaillait,

il fut visité par une inspiration : puisqu’il était avant tout dessinateur, pourquoi ne pas prendre ses dessins pour acteurs ? Pourquoi ne pas photographier des séries de dessins dont la projection au rythme cinématographique donnerait une illusion de mouvement ? […] Sans plus attendre, il se mit à l’ouvrage et réalisa le premier « dessin animé ».

Plutôt que « visité par une inspiration »,

il semble que Cohl se soit souvenu des jeux qui à l’instar du zootrope ou du phénakistiscope créent, en s’appuyant sur la décomposition, l’illusion du mouvement. La technique lui est familière, elle a déjà inspiré des illustrations, et lorsqu’il est interrogé en qualité de pionnier du dessin animé, il ne manque pas de s’y référer en préambule. Pour ce premier film, intitulé Fantasmagorie (1908), Émile Cohl s’inspire des croquis d’enfant et le spectateur assiste aux métamorphoses en forme d’élucubrations de personnages dénommés fantoches, sorte de bonshommes à membres bâton, dont les traits apparaissent en blanc sur fond noir. Léon Gaumont juge l’invention digne d’intérêt et s’incline devant le succès rencontré, car le film fait l’unanimité partout où il est projeté8. Transformation du procédé qui permet surtout de renouveler l’intérêt des films à trucs, dont la mode, d’après Victorien Jasset, a rapidement passé : « Après avoir eu un succès aussi énorme que mérité, le procédé américain fut presque abandonné, parce qu’il n’offrait plus assez de ressources ».

L’étude des films conservés suggère qu’Émile Cohl ait été dans l’obligation de se renouveler sans cesse. Jean-Georges Auriol (« Les premiers dessins animés cinématographiques, 1908, Emile Cohl ») le souligne également :

Cohl, qui a plus d’une petite invention à son actif, avait une ingéniosité inépuisable et venait à bout des trouvailles les plus compliquées. De toutes petites choses qui duraient trois ou quatre minutes sur l’écran lui demandaient des journées de recherches, de ruse et de persévérance.

« Ingéniosité inépuisable »

qui trouve dans un répertoire personnel les ressources de l’inventivité. On reconnaît une de ses têtes de pipe dans les Générations comiques (1909). Les Beaux-Arts mystérieux (1910) s’inspire de deux fantaisies publiées, tels que ces figures créées à partir d’allumettes bougies, présentées entre autres dans l’Illustration, ou à base d’épingles et de fil comme dans l’ABCD à la ficelle, invention qui lui a valu une médaille de vermeil au Concours Lépine. Dans Rêves enfantins (1910), il réemploie le serpent de Mon ami Polichinelle, un album pour enfants écrit par Albert Deparc, qu’il a illustré en 1897 et dans le Cerceau magique (1908), il retrouve les cocottes en papier qui scandaient les pages des Chambres comiques ou apparaissaient en motif dans le portrait charge de Georges Lorin, Hydropathe avec lequel il s’était associé pour créer le studio de photo. Cadre fleuris (1910) s’inspire des effets visuels produits par les chromatropes, objet dont il projetait les nuances dans ses séances de cinéma forain. Cohl s’attache à déployer les facéties visuelles qui composent son univers ludique, tandis que la désaffection des films à trucs l’oblige à employer ses talents en conformité avec l’esprit du temps. À l’instar de ses contemporains, il réalise des adaptations littéraires et anime au moyen de poupées le Tout Petit Faust (1910), d’après Gounod ou le Petit Chantecler (1910) d’après Edmond Rostand. Conformément aux préceptes en faveur du cinéma d’enseignement très répandus alors et auxquels souscrit Léon Gaumont, il réalise des films dont l’agencement chronologique n’est pas sans rappeler la progression didactique des conférences illustrées au moyen de vues sur verre. Il a par ailleurs été fait officier de l’Instruction publique en 1899. L’École moderne (1909), réalisé avec Étienne Arnaud, apparaît comme un manifeste en faveur du cinéma d’enseignement puisqu’il s’agit littéralement de la transposition en film d’un livre. Les Chapeaux des belles dames (1909) présente l’évolution des coiffes à travers les âges, tandis que les Douze Travaux d’Hercule (1910) traduit l’histoire mythologique. Succession chronologique qui d’après le fascicule promotionnel structurait également Dix Siècles d’Élégance (1910), film disparu à ce jour. Autant de sujets qu’on pourrait lui avoir suggérés, puisque la Bataille d’Austerlitz (1909), film d’enseignement militaire, est manifestement une commande. Léon Gaumont a en effet déposé, dès janvier 1900, un brevet pour « un système de production de bandes cinématographiques reproduisant des […] actions militaires ». Un cadre, somme toute assez docte, rapidement mis à mal par la caricature, qui a charge de défigurer les académismes. Pour les Locataires d’à côté (1909), Émile Cohl multiplie les techniques ou les trucages : dessin, papier découpé, cache qui lui permet de diviser son cadre en deux. Dans le Binettoscope (1910), il poursuit une déconstruction du dispositif cinématographique en s’autorisant une mise en abyme de la projection. Émile Cohl, se souvenant de son passé d’Incohérent, réalise le Peintre néo-impressionniste (1910) en hommage à Alphonse Allais dont un monochrome « primo-avrilesque » ornait les murs d’une de leurs expositions. Dans l’Enfance de l’art (1910) il fait littéralement des pieds et des mains avant d’oser le pied de nez et dans la Musicomanie (1910), il attaque les procédures didactiques déployées dans les films d’enseignement, en les associant à des personnages aux traits et attitudes des plus grossiers. Le dessin d’enfant ou le graffiti aurait finalement eut raison des dogmatismes : Émile Cohl quitte la société Gaumont.

Pathé :

D’après ses carnets, il pourrait avoir rejoint la société Pathé en raison d’une augmentation conséquente, mais temporaire, de ses appointements et l’aurait quittée suite à une « brouille ». Le changement de société, à première vue, n’aurait formellement que peu de conséquence, Émile Cohl avec le Retapeur de cervelles (1910), le Musée des grotesques (1911) ou les Fantaisies d’Agénor Maltracé (1911) paraît poursuivre les expérimentations précédentes : dessins au trait blanc sur fond noir, séquences animées associées à des prises de vues réelles, animations de dessins et de papiers découpés reprenant les traits stylistiques des caricatures.

source :

Les carnets filmographiques d’Émile Cohl ou le mouvement d’une œuvre : l’image par image de Gaumont à Éclair

The film notebooks of Émile Cohl or the movement of a work: image by image from Gaumont to Éclair. Valérie Vignaux

La machine à décerveler d’Alfred Jarry

Julien Schuh1 Détails1 CRIMEL – Centre de Recherche Interdisciplinaire sur les Modèles Esthétiques et Littéraires – EA 3311

Résumé : L’œuvre d’Alfred Jarry propose une utilisation singulière de la mémoire comme méthode de production textuelle. Jarry convoque les théories les plus récentes à son époque, dans les ouvrages de Théodule Ribot ou dans les cours de philosophie de Bergson, pour construire une image de la mémoire comme processus de vidange de l’esprit, destiné à ne conserver que l’essentiel de l’expérience humaine. Le processus de la mémorisation est pour Jarry d’abord oubli: c’est un mouvement d’effacement des contextes et de redistribution presque aléatoire des objets de l’expérience, qui doit permettre leur réutilisation dans une œuvre nouvelle. Celui qui sait utiliser sa mémoire ou plutôt, paradoxalement, celui qui sait oublier à bon escient, est capable de produire des textes parfaits, dépourvus de toute aspérité, des œuvres suggestives disponibles pour une multitude d’interprétations. Ce processus, qu’il nomme la ‘Machine à Décerveler’, représente, comme l’écrit Linda Stillman, ‘une métaphore du mécanisme de l’imagination et de l’écriture’.